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         Avant de créer la bourse d'études, de doter la chaire, 
          de construire l'immeuble ou de mettre sur pied le centre de prestige, 
          par exemple l'Institut d'études canadiennes de McGill, il faut 
          d'abord recueillir des fonds. Ainsi, un représentant de McGill 
          se charge de rencontrer la personne qui, d'après le Service de 
          développement, est susceptible de concrétiser le projet.
          Selon la 
          tournure de la discussion, la personne qui formule la demande de fonds 
          peut réussir à convaincre son interlocuteur de lui remettre 
          un chèque dans les six à sept chiffres, ou encore, ternir 
          la réputation de l'Université auprès d'une personne 
          très influente. Inutile de dire qu'elle marche sur des oeufs. 
   « Il faut bien préparer le terrain avant de s'adresser au 
          donateur éventuel » a indiqué Derek Drummond, BArch'62, 
          vice-principal (Développement et relations avec les aciens étudiants). 
          « On ne décide pas comme ça, du jour au lendemain, 
          de frapper à la porte d'un bureau. On doit effectuer des recherches 
          approfondies au préalable et cultiver une relation avec le donateur 
          éventuel qui va bien au-delà de l'argent. » 
         « Nous demandons aux donateurs de faire partie des comités 
          afin de les sensibiliser aux priorités de McGill. Nous les invitons 
          également à participer aux activités qui se déroulent 
          à l'Université, par exemple à assister au dernier 
          opéra monté par la Faculté de musique. Si on se 
          contente d'arriver chez les gens à l'improviste, la main tendue, 
          ils vont tout simplement nous envoyer promener », d'ajouter M. 
          Drummond. 
         Le Service du développement et des relations avec les anciens 
          étudiants collabore avec un fort contingent de bénévoles, 
          dont certains font partie des groupes de diplômés actifs 
          dans le monde entier. En général, il s'agit d'hommes et 
          de femmes qui gardent un excellent souvenir de leur passage à 
          McGill et qui sont gagnés à la cause de l'enseignement 
          supérieur. De plus, comme ils sont en contact avec des donateurs 
          éventuels dans leur vie sociale et professionnelle, ils sont 
          souvent en mesure de mettre McGill sur la bonne piste et de lui indiquer 
          ce qui intéresse ces gens. «Ce genre de relations est capital 
          pour nous », a mentionné M. Drummond.
        
  Des 
          agents de développement sont rattachés à chaque 
          faculté de l'Université et travaillent en étroite 
          collaboration avec les doyens en vue de dénicher des donateurs 
          éventuels. M. Drummond et son équipe sont épaulés 
          par un service de recherche qui passe en revue les rapports annuels, 
          les coupures de presse et d'autres documents susceptibles de nous fournir 
          des indices quant aux personnes cibles et à leurs intérêts. 
          « Nous n'allons pas trop en profondeur, la législation canadienne 
          sur la protection des renseignements personnels étant très 
          sévère », a déclaré M. Drummond. « 
          Aux États-Unis, la masse d'information que l'on peut obtenir 
          sur une personne dépasse l'imagination, de quoi faire dresser 
          les cheveux sur la tête à un Canadien. » 
 Et si plusieurs 
          facultés lorgnent le même donateur? Supposons qu'un diplômé 
          en droit a fait fortune dans le monde du spectacle. Pourrait-il être 
          à la fois dans le collimateur de la faculté de droit et 
          de la faculté des arts? M. Drummond préside un comité 
          qui est précisément chargé de sortir de ce dilemme, 
          le cas échéant.
         « Il est important que nous ayons la situation bien en main. Nous 
          tenons à éviter qu'un de nos doyens tombe sur un de ses 
          homologues d'une autre faculté dans une antichambre. Nous ne 
          voulons pas non plus que les donateurs aient l'impression d'être 
          harcelés ». Quelle faculté est l'heureuse élue? 
          « Celle qui est la mieux placée pour faire sauter la banque 
          ».
         Quant aux donateurs éventuels, ils s'attendent à ce qu'on 
          se renseigne à leur sujet avant de leur demander des fonds. « 
          Les gens qui me sollicitent doivent d'abord faire leurs devoirs », 
          a affirmé Heather Reisman, directrice générale 
          d'Indigo Livres et Musique. « Certaines causes me tiennent vraiment 
          à cìur. Je suis beaucoup plus susceptible d'être réceptive 
          si la demande de fonds se rapporte à une de ces causes. » 
          Par exemple, Mme Reisman affectionne les projets qui mettent en relief 
          le rôle des femmes dans les professions. Ainsi, elle a récemment 
          doté une chaire de soins infirmiers à la University of 
          Toronto.
         Vivienne Poy, BA'62, qui a réussi dans la mode et les cosmétiques 
          à la tête de Vivienne Poy Enterprises et qui vient d'être 
          nommée sénatrice, reconnaît que les collecteurs 
          de fonds devraient se donner la peine de mieux la connaître. « 
          Par exemple, j'apporte généralement une contribution aux 
          humanités parce que ces disciplines bénéficient 
          rarement du même soutien que la médecine et le génie. 
          »
         Aux dires de M. Drummond, la personne qui aborde le donateur joue un 
          rôle capital. « Ce n'est pas tant à l'institution 
          qu'à la personne qui les sollicite que les gens font des dons. 
          Par extension, des donateurs restent sourds aux demandes de certaines 
          personnes. On doit donc les choisir avec soin. En règle générale, 
          ils ne donnent rien aux agents de développement. En fait, nous 
          sommes des timoniers; nous sommes là pour tenir le cap. »
         « La demande de fonds a énormément de poids si elle 
          est formulée par une personne réputée pour sa grande 
          générosité », a soutenu Mme Reisman, « 
          par opposition à une personne dont le seul mérite est 
          d'occuper un poste dans une grande société. Brian Levitt 
          [le chef de la direction d'Imasco] constitue un bon exemple. On peut 
          difficilement trouver une personne aussi charitable. Si une personne 
          telle que lui fait la démarche, c'est inspirant. » David 
          Lank, spécialiste des services bancaires d'investissement, estime 
          que les universités confient souvent cette tâche à 
          la mauvaise personne. Il a recueilli des fonds pour un large éventail 
          de projets, de la réfection en profondeur et de l'agrandissement 
          du Musée McCord de Montréal (en tant que président 
          du conseil d'administration) à l'érection de la statue 
          de James McGill, qui est devenue indissociable du campus. « C'est 
          classique. Une personne est susceptible de faire un don très 
          important et tout le monde est au courant. Une personne de l'Université 
          tient à faire les démarches auprès de ce donateur 
          éventuel en raison du prestige qui rejaillira sur elle. Par contre, 
          il y a un bénévole qui est intimement lié au donateur. 
          La personne de l'Université a obtenu des fonds, mais le don aurait 
          été beaucoup plus élevé si la demande avait 
          été présentée par le bénévole. 
          »
         On peut faire beaucoup avec un don d'un million de dollars; par exemple, 
          on peut créer une chaire d'enseignement. Cependant, l'Université 
          compte davantage sur la légion de donateurs qui apportent une 
          légère contribution chaque année. Selon Marie Giguère, 
          BCL'75, première vice-présidente, chef des services juridiques 
          et secrétaire de Molson Inc. et dirigeante du Fonds Alma Mater 
          de McGill, l'existence d'un réseau bien établi de groupes 
          de diplômés à l'échelle de l'Amérique 
          du Nord et, de plus en plus, de la planète, facilite énormément 
          la campagne de financement annuelle.
         « Il est essentiel de faire naître un sentiment d'appartenance 
          à une communauté chez les diplômés de McGill 
          », a déclaré Mme Giguère. « Même 
          à des milliers de milles de distance, ils demeurent liés 
          à Montréal et à McGill. Il y a peu d'universités 
          au Canada qui peuvent compter sur une telle relation. C'est une des 
          grandes forces des universités américaines. » C'est 
          entre autres pour cette raison que les institutions américaines 
          surpassent nettement leurs homologues canadiennes au chapitre de la 
          collecte de fonds.
         On pourrait même dire que cette différence ne date pas 
          d'hier. L'automne dernier, Lucien Bouchard, premier ministre du Québec, 
          assistait à l'inauguration de la bibliothèque de droit 
          Nahum Gelber, qui a été financée uniquement grâce 
          à des dons privés. Il a alors vanté la générosité 
          des diplômés de McGill et des donateurs et dit souhaiter 
          que les francophones apportent le même soutien à leurs 
          alma mater.
         « Le don s'inscrit davantage dans une tradition chez les Anglo-Saxons 
          que chez les Français ou les Européens » a avancé 
          Mme Giguère. « Les francophones s'en remettaient à 
          l'Église ou à l'État. Les Anglo-Saxons se prenaient 
          un peu plus en charge. Mais les temps ont changé. J'ai grandi 
          dans une famille qui a toujours apporté son soutien à 
          des organismes et à des programmes. »
         Purdy Crawford, président d'Imasco, participe depuis des années 
          aux activités de financement de McGill, de la Mount Allison University 
          et d'autres institutions sans but lucratif. Il a sollicité bien 
          des gens, mais n'aime pas se présenter seul devant un donateur. 
          « En général, j'invite les gens à faire un 
          don uniquement si un professeur ou un doyen, c'est-à-dire une 
          personne associée de près au projet, est à mes 
          côtés. Il y a des exceptions, mais je préfère 
          procéder de cette façon. »
         
           
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              Before the scholarships, before the endowed chairs, before the 
                new buildings or the high-profile centres like the McGill Institute 
                for the study of Canada, comes the ask. Someone representing McGill 
                sits down with an individual the Development Office has identified 
                as the prospective donor who can make that endowed chair or scholarship 
                happen.  
              "There is a lot of groundwork that goes into it before the actual 
                ask," says Vice-Principal (Development and Alumni Relations) Derek 
                Drummond, BArch'62. "You don't just decide one day to turn up 
                in somebody's office. You do a lot of research beforehand and 
                you cultivate a relationship with them that involves much more 
                than just the money they might have to offer."  
              Drummond says that people are asked to sit on University committees, 
                for example, so that "they understand what the issues are at McGill." 
                Or they might be invited to the Faculty of Music's latest opera 
                production. "If you just knock on their door one day out of the 
                blue and hold out your hand, they'll tell you to bugger off." 
               
              Being prepared could mean the difference between success and 
                failure, says Heather Reisman, CEO of Indigo Books and Music. 
                "People who approach me ought to do their homework first. There 
                are certain causes that I feel a real attachment to and I'm much 
                more likely to be receptive if the ask is related to them."  
              While a million-dollar gift can fund a big-ticket item like an 
                academic chair, there is also an art to encouraging people to 
                give smaller gifts on a regular basis. Marie Giguère, BCL'75, 
                Chief Legal Officer and Secretary at Molson Inc., heads McGill's 
                Alma Mater Fund and says the University's impressive annual fundraising 
                efforts benefit enormously from a long-established network of 
                alumni chapters. "You have to build a sense of community and belonging 
                to McGill - that's essential. People who live thousands of miles 
                away still have a connection to McGill and to Montreal. We're 
                one of the few universities in Canada that does this," says Giguère. 
               
              Reeling from recent massive budget cuts, universities will have 
                to hone their "artistic" skills as they rely increasingly on private 
                donations, both large and small.  
              This article was first appeared in English in the McGill Reporter. 
                
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        M. Crawford aide actuellement l'Institut neurologique de Montréal 
          à amasser des fonds pour son Centre de recherche sur les tumeurs 
          cérébrales. Le Dr David Kaplan, le directeur du centre, 
          accompagne souvent M. Crawford dans ses démarches. « Je 
          présente David au donateur éventuel et je le laisse parler 
          pendant 20 minutes. Le centre, c'est sa passion, et il arrive à 
          l'exprimer dans son exposé. Pour certains donateurs, il est essentiel 
          que le principal en personne vienne à leur rencontre. Ils croient 
          que, si le premier dirigeant se donne la peine de se déplacer, 
          c'est que l'enjeu est important. » 
         Pour Mme Poy, le choix de la personne qui doit présenter la 
          demande de fonds n'est pas si déterminant que cela. « Ça 
          ne m'influence pas du tout », a-t-elle précisé. « 
          L'important, c'est la cause. En partant, il faut également que 
          j'aie confiance en l'institution. » 
         Évidemment, il y a des membres du corps professoral qui ne veulent 
          pas participer aux activités de financement. « Certains 
          professeurs considèrent le Bureau de développement comme 
          le rebut de l'Université », a fait remarquer M. Lank. « 
          Ils devraient savoir que, sans les collecteurs de fonds et les bénévoles, 
          ils dépendraient exclusivement de l'État. En pareil cas, 
          s'ils voulaient une bourse pour un étudiant ou améliorer 
          leurs installations, ils pourraient toujours courir. »
         M. Crawford se souvient avoir participé à une campagne 
          orchestrée par le pire président que l'on puisse imaginer. 
          « Il finissait toujours par agacer son interlocuteur. Sous d'autres 
          rapports, il jouait bien son rôle de président, mais il 
          était nerveux à l'idée de demander de l'argent. 
          Ça le mettait tout simplement mal à l'aise. » M. 
          Crawford a eu tôt fait de se faire accompagner par quelqu'un d'autre 
          dans ses démarches.
         Selon Mme Giguère, il convient de rappeler aux gens les bienfaits 
          à long terme. « Nous devons les convaincre que, comme l'État 
          réduit constamment sa participation financière, ils se 
          doivent d'appuyer les universités pour le bien de la société, 
          tout particulièrement s'ils ont eu la chance de faire des études 
          universitaires. »
         « Il n'appartient nullement au Bureau de développement 
          de déterminer comment l'argent recueilli sera utilisé 
          », a expliqué M. Drummond. « Les universitaires nous 
          indiquent le montant que nous devons amasser. Nous formulons nos demandes 
          en conséquence auprès des donateurs éventuels. 
          Nous accordons la priorité à l'aide financière 
          aux étudiants, à l'enseignement, à la recherche 
          et aux bibliothèques. Nous pouvons difficilement sortir de ce 
          cadre. »
         « Le donateur a bien le droit de poser certaines conditions; après 
          tout, c'est son argent », a soutenu M. Lank. Il faut avant tout 
          s'assurer que ces conditions ne vont pas à l'encontre des objectifs 
          de l'Université. M. Lank sait que, dans au moins un cas, l'Université 
          a refusé la dotation d'une chaire parce qu'elle n'a pas pu s'entendre 
          avec le donateur sur le choix du titulaire de la chaire. « Dans 
          de telles situations, l'Université doit se désister; elle 
          imposera ainsi le respect. »
         « À mon avis, le donateur ne devrait pas imposer de conditions 
          », a mentionné Mme Poy, qui a créé des bourses 
          d'études supérieures à la University of Toronto 
          et des bourses de début d'études pour la faculté 
          des arts de McGill. « Je n'oserais jamais. Je suis une chaude partisane 
          de la liberté des universitaires. » Elle croit cependant 
          que l'on est en droit de s'assurer que les dons contribuent à 
          la réalisation des objectifs décrits par l'université 
          lors de la demande de fonds. « Si je sens qu'il y a un problème, 
          je vais m'objecter immédiatement.» 
         De même, les universités ne doivent pas manquer d'informer 
          le donateur lorsque l'argent change de main. Mme Poy a expliqué 
          que McGill lui a toujours communiqué le nom des récipiendaires 
          des bourses de début d'études créées grâce 
          à ses dons. « L'Université me tient au courant. Si 
          on se contente de prendre mon argent sans se soucier de moi, ce sera 
          la fin de la relation. »
         « L'information circule constamment; nous devons la ventiler en 
          fonction de chaque donateur, » a déclaré M. Drummond. 
          « Nous consacrons beaucoup plus de temps et d'argent au suivi pour 
          répondre aux attentes des donateurs. Nous devons être en 
          mesure de répondre à toutes les questions qui nous sont 
          posées. »
         L'État a récemment sabré l'enveloppe budgétaire 
          de l'éducation, et les universités doivent se débattre 
          pour combler le manque à gagner. Si elles veulent survivre, elles 
          feraient mieux d'avoir des réponses en réserve. 
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